Passionné de voyages d’aventure, de sports outdoor et d’écologie, Benjamin de Molliens, 32 ans, s’est lancé dans un projet à la mesure de ses rêves, baptisé Expédition Zéro.
Cette initiative consiste à réaliser des aventures sportives itinérantes, marrantes et engagées écologiquement. Pour chaque expédition, Benjamin respecte 3 règles : émettre Zéro émission de carbone, acheter Zéro matériel neuf et produire Zéro déchet.
Originaire de Larmor-Plage en Bretagne, il est de retour après une nouvelle Expédition Zéro sur le Canal du midi. Témoignage d’un aventurier engagé et souriant.
1 – Avant d’en savoir plus sur Expédition Zéro, peux-tu nous raconter ton parcours ?
J’ai fait mes études en école d’ingénieur (ICAM) à Nantes puis à Lille, et à cette époque, j’ai beaucoup voyagé : en Pologne via Erasmus, le long de la route de la soie durant 5 mois, j’ai également fait une traversée de l’Afrique de l’Est sur un mois et demi, ainsi qu’un stage de 6 mois à Shanghai.
Je me suis ensuite lancé dans un master spécialisé à l’ESSEC à Singapour. Après cela, j’ai intégré une entreprise de média basée à Madrid, qui m’a envoyé dans 5 pays émergents (Asie et Afrique) effectuer des rapports économiques. J’ai enfin rejoint une jeune entreprise du digital parisienne pour une nouvelle mission de deux ans à San Francisco.
2 – C’est ce qui s’appelle « voir du pays » 🙂 Et avant Expédition Zéro, tu étais déjà engagé écologiquement ?
Effectivement, début 2017, je suis rentré en France et j’ai co-fondé Plastic Odyssey, une expédition autour du monde sur un navire ambassadeur du recyclage et de la réduction des déchets plastiques dans les pays émergents.
J’ai quitté le projet en septembre 2019 puis fait du consulting en indépendant avec des missions écologiques.
Pendant le confinement j’ai eu l’idée de Expédition Zéro que j’ai lancé fin mai avec un premier défi itinérant à vélo entre Bretagne et Normandie.
Depuis, je dédie 100% de mon temps à Expédition Zéro. Je suis bien un passionné d’écologie et je souhaite en faire le combat d’une vie 🙂 .
3 – Quel est l’objectif d’Expédition Zéro avec ces 3 règles ?
Atteindre le « Zéro » c’est l’objectif ultime, l’enjeu étant de s’améliorer à chaque nouvelle aventure. Les expéditions se veulent accessibles pour donner envie au plus grand nombre d’essayer. L’objectif est bien de montrer une autre façon de voyager, beaucoup plus respectueuse de l’environnement mais tout aussi excitante et dépaysante.
En toile de fond, je dénonce la surconsommation, l’économie linéaire (produire, acheter, consommer, jeter) et la forte empreinte carbone de notre mode de vie. Je prône la sobriété heureuse, vivre avec moins mais mieux, de façon plus responsable et harmonieuse avec le reste du vivant et de la nature.
4 – Quel était le défi de ta dernière expédition sur le Canal du Midi ?
Le défi était de descendre le canal du midi de Toulouse à Sète en Stand Up Paddle, soit parcourir 252 km à coups de pagaie et passer 63 écluses à la force des bras. Cela m’aura pris 9 jours et autant de nuits en bivouac.
En plus de mes 3 règles Zéro, j’ai ramassé des déchets flottants tout le long du parcours avec une épuisette de compète. Enfin, je me suis imposé de garder avec moi jusqu’au bout tous les déchets non organiques que j’ai produit. Tout simplement pour bien se rendre compte des déchets que je produis en voyage et ainsi me forcer à les limiter au maximum.
5 – Que retiens-tu de cette expérience ?
La première chose qui m’a plu, c’est que je n’ai pas beaucoup anticipé ni planifié cette expédition. Ce fut assez spontané et rapide à mettre en place. Je ne me suis pas trop posé de questions.
Mes plus grosses difficultés ont été de supporter la chaleur intense et le vent de face sur certains jours. Avec 9h d’effort quotidien, j’ai dû varier mes positions sur le paddle afin d’éviter des douleurs physiques. Enfin la saleté. Je ne pouvais pas me laver dans le canal et je n’ai pas trouvé beaucoup de points d’eau pour le faire. Se coucher poisseux n’est pas toujours agréable.
Côté réussites, j’ai atteint mon objectif de relier la gare de Sète depuis celle de Toulouse uniquement à la rame. Au fur et à mesure du séjour, j’ai beaucoup gagné en efficacité : dans ma façon de pagayer, dans les passages d’écluses, etc. J’ai atteint le zéro absolu de matériel neuf pour cette expédition. Je n’ai presque pas produit de déchets non organiques, seulement l’équivalent d’un petit sac ziploc et j’ai rempli une vingtaine de fois mon bac à déchet, ce qui a permis de dépolluer un peu le canal.
6 – Ce type d’aventure laisse-t-il suffisamment de place aux rencontres ?
Oui tout à fait, puisque sur mes 3 itinéraires (celui à vélo, celui à pied et celui en paddle), je ne m’impose pas d’objectifs de temps trop ambitieux justement pour laisser un peu de place aux rencontres et aux imprévus.
Lors de mon périple à vélo je remplissais ma gourde chez les habitants donc cela m’a permis de discuter. À pied à travers les Alpes, j’ai fait plein de superbes rencontres. Soit avec des marcheurs comme moi avec qui j’ai partagé un bout de chemin, de quelques heures à plusieurs jours.
Comme Sophie Francois, une archéologue passionnée de montagne avec qui j’ai passé des moments très sympas. Au refuge de la Leisse, j’ai rencontré Félix, un jeune gardien qui est en train d’apporter des valeurs écologiques très intéressantes au lieu. J’ai adoré échanger avec lui. Vers la toute fin, sur les hauteurs de Menton, j’ai rencontré Christine, une allemande installée en France depuis longtemps et qui a ouvert un lieu de permaculture. C’était passionnant de visiter cet endroit. J’ai aussi rencontré un berger, un peu rustre et moderne à la fois, avec ses panneaux solaires dépliants sur le sac. J’étais tellement curieux de son mode de vie.
Enfin en paddle sur le canal, Tamara et Floriane, deux filles qui habitent à Béziers et me suivent sur les réseaux sociaux. Elles m’ont rejoint au Somail pour pagayer 11 kms ensemble et ramasser des déchets. J’ai adoré partager ce bout d’expédition avec elles.
7 – L’écologie est donc l’une des valeurs fortes de ton projet, quel conseil, idée, ou suggestion peux-tu donner aux voyageurs ?
Oui c’est un des piliers. Je pense que la plupart des personnes qui aiment le voyage, notamment le voyage d’aventure, l’aime notamment pour l’immersion dans la nature, le contact avec le monde sauvage.
Cet écosystème est très fragile et en remerciement du spectacle qu’il nous propose, il est important que l’on repense toutes et tous notre façon de voyager pour le préserver aussi longtemps que possible. Je crois que cela commence par :
- Repenser notre façon de nous déplacer : moins d’avion, de voiture, de moteurs tout simplement. Plus de mobilités douces.
- Repenser notre façon de s’équiper : Refuser, Recycler, Réparer…. Bref, mettre fin au réflexe du neuf et bon marché importé depuis l’autre bout de la planète. On a déjà produit des milliards de vêtements et d’équipements en tout genre. Il y a largement de quoi faire sur le marché de la seconde main.
- Repenser sa façon de se nourrir : produire moins de déchets, consommer bio, en vrac et local, ne pas laisser de trace…
Une idée au passage : lorsque vous partez en voyage, prenez un petit sac avec vous pour ramasser les déchets que vous trouverez sur votre chemin. Ok ce ne sont pas vos déchets, mais il abime votre planète. Et en les ramassant cela finira par interpeller les autres randonneurs / voyageurs qui finiront peut-être par vous imiter. Le projet 2 Pas Vers L’autre (2PVA) propose des sacs brandés »1kg for the planet », clin d’oeil au 1% for the planet de Patagonia.
8 – Quel sera ton prochain défi ?
Je n’ai pas encore décidé mais j’aimerais faire quelque chose soit à la voile en partant de chez moi à Marseille soit en ski (randonnée, nordique et pulka, kite-ski) dans les Alpes. Affaire à suivre 🙂 !