Sportive, aventurière et passionnée, Linda est une infatigable nomade, porteuse d’ondes positives et de sourires. Elle reste toujours prête pour de nouvelles expéditions à la rencontre des peuples. Comme pour Tania et Stéphanie, Linda a accepté de se raconter au travers d’une nouvelle série de dix mots. Bonne lecture.
Gendarmerie
« Ecouter qui nous sommes, ça ne fait pas partie du programme au lycée … A 15 ans, tout ce que je savais, c’est que je souhaitais du voyage, de l’action, des sensations fortes. Jamais je ne me suis imaginée dans un bureau, derrière un ordinateur et une montagne de dossiers qui obtureraient mon horizon.
Après avoir travaillé dur à l’Ecole de l’air pour devenir pilote de chasse. J’ai été déclaré inapte à cause d’une scoliose. J’ai tout de même poursuivi ma formation. J’y ai appris la cohésion, le dépassement de soi, la persévérance.
Ma porte de sortie fut la gendarmerie. Je voulais des responsabilités, j’en ai eu. Des missions concrètes et intéressantes. Un rythme de vie effréné qui m’a finalement conduite, au bout de 4 ans, au Ministère des finances à Bercy.
J’y ai rencontré de merveilleuses personnes. Mais de nouveau, je sentais que je n’étais pas à ma place. Et à 29 ans, après plusieurs mois d’introspection, et plus de maturité, j’ai réalisé une chose : je ne devais plus choisir un métier, encore un autre, mais un mode de vie, celui qui correspondrait à mes besoins. Juin 2011, je suis partie. Pour de bon. Pour me consacrer à ce que je suis : une nomade des temps modernes. »
Vie normée
« Vous l’aurez deviné, la vie normée, dictée par la société, ce n’est plus pour moi ! J’en ai fait l’expérience, et je parle donc en pleine connaissance de cause. Il est certain que je sais m’y adapter. Nous pouvons tous nous adapter. Mais à quel prix ? Notre existence est si courte et si précieuse que, s’il nous arrive de faire des erreurs (et c’est même essentiel pour pouvoir apprendre et évoluer), il est nécessaire de les reconnaître et de se remettre en route sur le bon chemin. Le chemin qui mène à soi.
La seule norme qui vaille, selon moi, est donc celle de s’écouter. C’est en allant vers soi qu’on peut davantage aller vers les autres. S’ouvrir à eux. C’est en se connaissant davantage qu’on peut atteindre l’harmonie.»
Courir
« Courir : mon sport favori. J’ai essayé différents sports, mais je suis toujours revenue à celui-ci. La course à pied est intense et répond à l’un de mes besoins essentiels : le défi. Il est le seul sport qui me permette de me dépasser à la fois mentalement et physiquement.
Ce que j’aime avant tout dans la course à pied, c’est le sentiment de plénitude et d’accomplissement à l’issue d’une séance. Et la douche chaude, quand il y en a une !
De plus, j’imagine qu’il y a une explication chimique et hormonale à tout cela (oui, les endorphines et tout le reste), mais à chaque fois que j’ai eu besoin d’y voir plus clair dans un projet, c’est pendant la course que mes idées ont commencé à se structurer.»
Nature
« Je noue avec la nature une relation intime. J’ai eu le bonheur de grandir à la campagne et de voyager très tôt sur les océans et parmi les montagnes. Peu à peu, confrontée aux expériences citadines, j’ai pris conscience du caractère authentique et précieux des lieux où j’avais vécu et voyagé.
La nature fut mon recours lorsque j’ai commencé à me perdre dans cette vie qui n’était pas la mienne. J’étouffais. Tout se resserrait autour de moi et je ne souhaitais qu’une chose : m’évader. Lorsque j’ai finalement tout plaqué, il m’a paru évident de partir dans des régions où la nature s’exprimait encore dans son état le plus pur. Là où les hommes la vénèrent et la respectent. Le Kamchatka et l’Alaska furent la réponse à ce besoin.
A chacun de mes voyages, j’apprends davantage à l’écouter, à l’expérimenter (d’où mon choix pour la marche, la course à pied ou le vélo), et à la respecter. C’est un apprentissage de longue haleine, dont la société nous éloigne, qui nous ramène à notre propre nature, à nos instincts premiers. Quelques semaines ne suffisent pas. C’est pourquoi je pars plusieurs mois à chaque fois. »
Tchouktches
« Pour mon premier voyage au long cours, j’ai choisi l’extrême orient sibérien, le Kamchatka. Je n’étais jamais allée en Russie. Je ne parlais pas un mot de russe. Et pourtant, lorsque j’y ai posé les pieds pour la première fois, je me suis étrangement sentie comme chez moi. Toutes les portes s’ouvrirent et les gens m’accueillirent les bras ouverts pour m’aider à préparer ce premier voyage où le seul objectif était de me laisser guider par mon intuition. De rencontres en rencontres, je découvris un monde encore plus inconnu que le Kamchatka lui-même : le monde des Tchouktches éleveurs de rennes.
A pied, ils parcourent environ 600 kilomètres, en plein coeur d’une toundra sauvage, royaume des ours et des loups. Sans hésiter, je décidai de les rencontrer et j’ai découvert une culture nomade entourée de tout ce que je recherchais : la nature et l’authenticité. A la fin de ce séjour, la brigade d’éleveurs de rennes avec qui j’avais vécu était devenue mienne. Je mangeais comme eux, je voyais comme eux, je vivais comme eux. Les rennes m’avaient envoûtée et la perspective de mon retour fut une évidence.
Hiver 2014, ce moment tant attendu arriva. Dès le premier jour, je me retrouvai comme parmi les miens, et je découvrai cette fois-ci des terres d’une blancheur vertigineuse. Je ne m’étais pas trompée : la magie de ces terres était bien réelle. »
Sourire
« Pourquoi tu souris tout le temps ? me demande-t-on souvent. Parce que j’aime la vie ! Parce qu’un sourire ne coûte rien mais apporte tant. Parce qu’un sourire est universel et dépasse la barrière des langues et des cultures.
Le sourire ne se lit pas avant tout sur la bouche, il se lit dans le regard. Cette projection de l’âme illumine un visage, un être, et tout ce qui l’entoure. Le monde devrait se sourire davantage à lui-même. Cela lui éviterait bien des maux. Alors sourions, sourions-nous et transmettons ces sourires ! »
Indonésie
« Je suis née en France, mon père est franco-italien et ma mère est indonésienne. Le voyage coule dans mes veines. Pendant longtemps, je ne me suis pas souciée de mes origines indonésiennes, bien trop occupée à m’adapter à mon pays de naissance. Jusqu’en décembre 2012. J’étais seule et ma mère aussi. Cela faisait plusieurs années qu’elle n’était pas retournée dans son pays d’origine. Je l’ai donc emmenée à mes côtés pour qu’elle me montre ce que j’ignorais d’elle et de moi.
Nous somme arrivés à Jakarta sous la mousson, dans l’un des quartiers les plus pauvres, où vit toute la famille de ma mère : ma grand-mère et mes huit oncles et tantes. Ces 9 larges sourires m’accueillirent comme s’ils m’avaient toujours connue. Pendant deux mois, je me suis intégrée à la communauté, participant à une vie quotidienne simple et sereine, savourant les fruits que les voisins m’offraient et recherchant curieusement chez eux une petite parcelle de moi.
Étonnamment, je n’ai pas eu de révélation sur un moi que j’aurais ignoré jusque là. Mais peu importe. Ce que je ressentis, ce fut le plaisir de partager et de découvrir la culture de la femme qui m’a mise au monde. En cela, ce fut un voyage inestimable. »
Écriture
« J’aime l’écriture, j’aime les mots, j’aime cette plongée de l’esprit qui permet d’analyser puis d’exprimer ce qu’il y a de plus vrai en soi.
Le livre que j’écris actuellement porte sur le thème du retour à soi. Je ne souhaitais pas faire uniquement le récit de mes voyages, mais le récit de mon voyage intérieur qui m’a lui-même amené vers le voyage.
Si je voyage, soyons clair et honnête, c’est avant tout pour moi. Plus qu’un désir, c’est un besoin. M’éloigner du voyage, c’est m’éloigner de moi-même et me tuer à petit feu. C’est dans le voyage et par le voyage que je me suis trouvée, que je me suis épanouie et que je suis aujourd’hui en harmonie. Et si j’ai pu identifier ce besoin, c’est grâce à un retour à mon moi profond. La clé de l’épanouissement personnel est là : le retour à soi. C’est par l’écriture que je souhaite partager cette découverte. »
Zanskar
« Le Zanskar est une région reculée du nord de l’Inde, au coeur de l’Himalaya. J’y suis restée deux mois, en été 2013, en tant que professeur d’anglais volontaire dans deux nonneries différentes, situées à 4000 mètres, dans un décor grandiose. J’ai découvert un univers spirtuel fascinant, emprunt d’amour et de compassion.
Une grande complicité s’installa entre les nonnes et moi. Elles me baptisèrent Linda Dolma, ce qui signifie Linda Longue Vie. Chacun de leurs sourires, chacun de leurs regards est resté gravé en moi. Leurs prières quotidiennes sont devenues une musique qui me berce encore, plus d’un an après. »
Rêve
« Le rêve, manifestation de l’inconscient. Je ne vais pas revenir sur les théories freudiennes. Mais qu’en est-il du rêve en tant que prémonition ? Du rêve en tant que guide ? A plusieurs reprises, pendant mon enfance et après avoir tout quitté, je fis ce type de rêves. Le dernier d’entre eux me mena mystérieusement au Zanskar, à la rencontre du bouddhisme, à la rencontre des nonnes. Voilà donc la façon dont je voyage : un signe, un rêve, une intuition me mène sur des chemins que je ne soupçonnais pas. Je ne calcule pas, je ressens. Et je fonce ! C’est ainsi que je vis des expériences fascinantes, enrichissantes et fortes. Et je me plais à croire que c’est de cette façon dont il faut vivre sa vie.»